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Maladies <i>invisibles</i> : comment en parler entre parents et <i>enfants</i> ? - Doolittle
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Maladies invisibles : comment en parler entre parents et enfants ?

Le 6 octobre 2022 marque la sortie du livre « Ma maman vit avec une maladie invisible – mais moi je la vois ! » de Tamara Pellegrini et illustré par Mathilde Baudy. Les 42 pages colorées et ornées de dessins sont dédiées à un sujet encore majoritairement inconnu du grand public :  les maladies invisibles, aussi qualifiées de maladies chroniques, telles que les scléroses en plaques, les dépressions, les endométrioses, les fibromyalgies, les troubles bipolaires, les AVC, les migraines, les troubles anxieux, etc.

Tamara Pellegrini est une Genevoise de 31 ans, atteinte du syndrome du mal de débarquement. Depuis environ 4 ans, elle vit avec sa maladie qui est arrivée subitement dans sa vie : « D’une seconde à l’autre, je suis tombée malade. Je suis montée sur un bateau et en redescendant, je suis restée comme qui dirait « en pleine mer ». Depuis, je tangue « h24 » comme si j’étais encore sur ce bateau. Ensuite ce sont cumulés d’autres symptômes : des troubles cognitifs, de l’épuisement chronique, des pertes de mémoire, des nausées, des vomissements, etc. Ça s’est avéré être une maladie neurologique qui s’appelle le syndrome du mal de débarquement. À partir de là, ma vie s’est complètement transformée. » Depuis, Tamara s’est trouvé un nouveau rythme de vie et s’engage à parler de ces maladies chroniques à travers son podcast « Les Invisibles ». Elle leur a même consacré un livre, « Ma maman vit avec une maladie invisible – mais moi je la vois ! », récemment, qui lui vaut de nombreux retours positifs : « On a mis des réglettes dans le livre pour que l’enfant puisse se situer au niveau de l’humeur et de la douleur et aussi pour que le père ou la mère puisse parler plus facilement de sa maladie. C’est hyper chouette, apparemment ça crée vraiment beaucoup de discussions et les parents sont hyper étonnés de l’avancement des réflexions de la part des enfants. »

Maladies <i>invisibles</i> : comment en parler entre parents et <i>enfants</i> ? - Doolittle
Maladies <i>invisibles</i> : comment en parler entre parents et <i>enfants</i> ? - Doolittle
Maladies <i>invisibles</i> : comment en parler entre parents et <i>enfants</i> ? - Doolittle

1 – Libérer la parole

Maman de deux jeunes enfants et atteinte d’une fibromyalgie ainsi que d’un TDAH (trouble de déficit d’attention avec ou sans hyperactivité), Tiffany Mazars trouve que le livre permet de soutenir les parents dans leurs discours concernant la maladie : « En tant que parent, on n’a pas forcément toujours les mots pour expliquer, on essaye de dire les choses, sans dramatiser, en faisant attention pour ne pas inquiéter. Et des outils comme ce livre, ça permet à la fois aux parents et aux enfants de se placer dans la maladie, et je trouve que c’est un bon apprentissage d’accompagnement sur les émotions. »  Paula, elle, est maman d’une fille de 10 et est atteinte de la maladie de Ménière depuis deux ans, une maladie chronique de l’organe de l’équilibre. La concernant, le livre a eu un impact important sur sa fille : « Après la lecture du livre, elle a sorti ce qu’elle n’arrivait pas à dire depuis 2 ans, et pourtant elle était là et m’accompagnait lorsque j’étais malade. Elle a réussi à extérioriser et elle nous a dit qu’elle vivait très mal ma maladie. »

Lorsque l’un des parents est malade, la communication est primordiale. Choisir les mots et choisir ce que l’on veut dire dépend avant tout des parents. Cependant, il est néfaste pour l’enfant de cacher la maladie comme l’explique la psychothérapeute et écrivaine, Isabelle Filliozat : « Cacher n’a jamais été bon, car lorsque l’on cache quelque chose à l’enfant, il le sent et panique. Évidemment, on ne dit pas les mêmes choses à un bébé de six mois qu’à un préado de douze ans, et on adapte ce qu’on va dire. Mais une des choses importantes, c’est qu’il n’y ait pas de stress et que les enfants ne perçoivent pas la tension existante chez les parents à l’évocation du sujet de la maladie, à l’idée du secret. » Avant de poursuivre : « Le problème, c’est qu’on a peur des émotions et on ne sait pas quoi en faire. On est démunis, on évite de parler des sujets qui suscitent les émotions. Mais non, on a juste besoin d’apprendre à vivre avec nos émotions, parce que l’objectif c’est justement d’enseigner à l’enfant à réguler ses émotions. »

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2 – Apprendre à ne pas culpabiliser

« La question de la charge mentale est importante. Elle est déjà énormément présente chez les parents et les mamans en particulier, alors lorsqu’on est une maman atteinte d’une maladie invisible, la charge mentale est encore plus oppressante car un sentiment de culpabilité va souvent s’y ajouter. » Les mots de Tamara Pellegrini sont partagés par de nombreux parents. Lorsqu’on est atteint de maladies invisibles, il est difficile de pouvoir suivre l’énergie d’un enfant, l’imprévisibilité de la maladie laisse toujours l’organisation d’une journée incertaine.

Tiffany Mazars témoigne de cet aspect de la maladie parfois lourd à supporter : « Il y a ce côté de culpabilité de la mère qui se dit qu’elle ne peut pas faire comme tous les autres parents. Je peux très bien aller durant une journée et le lendemain être au bout du rouleau, et c’est vraiment cette variante qui n’est pas facile à gérer pour les enfants parce qu’ils ne savent pas trop comment, ni quand compter sur moi. » 

Souvent, les enfants peuvent tirer les parents malades vers le haut, mais aussi les contraindre à dépasser leurs limites par amour. Paula illustre cette situation : « Je vais avoir tendance à faire passer ma fille avant ma santé. C’est à dire que je vais essayer de sortir avec elle dès que je peux même si je me sens mal, parce que c’est une enfant et qu’elle a besoin de vivre, surtout à son âge. » 

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3 – Communiquer pour ne pas transmettre

Ainsi, le livre « Ma maman vit avec une maladie invisible – mais moi je la vois ! » de Tamara Pellegrini permet de libérer la parole et de communiquer entre parents et enfants pour que chacun prenne conscience de la maladie et éviter tout sentiment de culpabilité.  Le manque de communication lorsqu’une maladie invisible est présente au sein d’une famille peut avoir des répercussions directes sur l’enfant. La psychothérapeute, Isabelle Filliozat, explique : « Lorsque la maladie est diagnostiquée chez un parent, l’enfant se comporte beaucoup mieux car il va pouvoir décoder les raisons du comportement de son parent, il sait que ce n’est pas sa faute à lui. À contrario, un enfant qui ne sait pas que son parent est malade, pour qui le diagnostic n’a pas été posé, ne va pas avoir moyen de prendre de la distance et ne va pas savoir différencier les crises dues à la maladie et le comportement naturel du parent. »

C’est d’ailleurs l’une des raisons pour laquelle Tamara Pellegrini a décidé d’écrire ce livre : « J’ai vécu avec un parent malade. Je percevais pleins de choses au travers de ce que pouvait vivre ma mère, mais personne ne m’expliquait ce qui se passait, ce qui fait que j’étais très anxieuse et que je pouvais me sentir très responsable de son vécu parce qu’il n’y avait pas d’espace, ni d’outils pour en parler. »

  • Acheter le livre Ma maman vit avec une maladie invisible mais moi je la vois !, Tamara Pellegrini (Auteur), Mathilde Baudy (Illustration) Atelier de la Belle Etoile, 15€
Par Héloïse Robert