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On a assisté à un <i>débat</i> sur l’éducation <i>bienveillante</i> - Doolittle
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On a assisté à un débat sur l’éducation bienveillante

Le 27 janvier dernier, à l’occasion d’une semaine de formation, des professionnels de la petite enfance ont eu l’honneur d’assister à un débat sur le bon sens éducatif entre Boris Cyrulnik et Caroline Goldman.

D’un côté, Boris Cyrulnik, neuropsychiatre. De l’autre, Caroline Goldman, psychologue clinicienne. Elle remet au goût du jour le time out, le fait de mettre à l’écart – dans sa chambre – l’enfant en cas de débordements/bêtises/crises (barrez la mention inutile). Dans le public, beaucoup de femmes et quelques hommes prennent des notes pendant que les deux protagonistes sont concentrés. Voici ce que l’on a retenu de leurs échanges, en 4 points clés.

On a assisté à un <i>débat</i> sur l’éducation <i>bienveillante</i> - Doolittle

1 – Il n’est pas interdit d’interdire

Boris Cyrulnik prendre la parole en interrogeant l’audience, est-ce qu’un trop plein d’écran ou un mauvais équilibre alimentaire ne serait pas aussi une violence éducative ordinaire ? « Ne pas interdire est aussi une maltraitance, déclare-t-il. Même le chaton qui fait mal à sa mère quand il tête ou qui feule et menace de la patte sans sortir ses griffes, sa mère lui fait savoir qu’il ne doit pas faire ça. Il faut un frein à l’expression des émotions, même quand on est un chaton ». Il en va de même pour les bébés à qui on émet des interdits en faisant des petits bruits de bouche par exemple, en fronçant les sourcils ou en parlant fermement. « Un bébé à qui on n’apprend pas à freiner sa pulsion de mordre ou taper va continuer à le faire à l’école, et même au collège et peut-être plus tard, avec des pulsions sexuelles en plus », prévient-il. Mais attention, il ne faut pas trop interdire non plus car ce serait contre productif. « Cette phrase, ‘interdit d’interdire’ est criminelle, cela signifierait que je laisse la violence se mettre en place. Il faut donc interdire avec des mots, pour mettre un frein émotionnel, disant à l’enfant ‘tu ne peux pas tout te permettre’ », révèle Boris Cyrulnik. Selon lui, les dangers de l’éducation reposent sur le désordre mais aussi l’ordre. « Entre les deux, il faut trouver des solutions éducatives ».

2 – Une réaction plutôt que pas de réaction

Boris Cyrulnik rappelle l’expérience du visage impassible, des années 70. En vidéo, on y voit une mère et son bébé échanger des sourires, faire des petits bruits, communiquer en fait. D’un coup, le visage de la mère devient immobile, elle n’a aucune réaction quand il essaye d’attirer son attention en souriant, montrant du doigt, etc. Sans réponse, il se met à pleurer. « On voit bien que sans interaction, le bébé est désorganisé. Comme dans cette autre expérience dans laquelle des bébés jouent et finissent par se pousser, face à des adultes silencieux, c’est mauvais signe car cela signifie qu’ils ne se prennent pas en compte les uns les autres. À nous de leur signifier », explique-t-il. Mieux vaut donc une réaction, sans violence évidemment, que pas de réaction du tout.

3  – Amour, explications et limites

C’est au tour de Caroline Goldman, psychologue clinicienne, de s’exprimer. Elle commence par rappeler les bases de la parentalité positive : amour, explications et des limites éducatives. « Ce dernier volet ayant été rogné par mesdames Filliozat et Guegen », affirme-t-elle. Depuis 8 ans environ, la psychologue voit débarquer, dans son cabinet, de plus en plus d’enfants atteints de troubles psychologiques liés au manque de limites. « On peut souffrir du manque d’amour mais aussi du manque de restrictions éducatives. Je vois des parents menottés par leur autorité parentale parce qu’ils ne posent pas de freins ». Ca donne des enfants qui poussent les autres dans les escaliers et vont faire un câlin à la maîtresse ou encore des parents à qui on a conseillé de faire un câlin à leur enfant, respirer, faire boire un verre d’eau. « C’est sain mais ça ne marche pas », lâche-t-elle. L’assistance rigole.

4 – Et le Time out, alors ?

Selon Caroline Goldman, quand un enfant parle trop, trop fort, râle, impose sa mauvaise humeur, refuse ou fait trainer les injonctions des parents, refuse de laisser l’écran, manque de politesse, manque de respect envers les autres, malmène la famille, est violent, a un ton inapproprié ou sollicite de manière harcelante, il faut établir des limites. « L’amour ne va pas suffire. Et la plupart des parents ne sont pas préparés à avoir ce genre de rendez-vous avec leurs enfants », analyse-t-elle. Sa solution ? Le time out dans sa chambre. Combien de temps ? À adapter selon la « bêtise », « une ou deux minutes quand l’enfant a 2/3 ans ». S’il refuse ou jette ses jouets, le temps est allongé. « S’il affiche un air satisfait, c’est bien, il est content de recevoir la restriction qu’il a demandée. Les enfants appellent les limites, aux parents de leur donner », assure-t-elle. Pour conclure, le neuropsychiatre en a profité pour citer Freud : « Rassurez-vous, quoi que vous fassiez, c’est raté ». Tout le monde applaudit. Et d’ajouter : « Si vous ne faites rien, c’est encore pire ».

Par Julie Falcoz