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Comment le masque de <i>Scream</i> est devenu <i>cultissime</i> - Doolittle
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Comment le masque de Scream est devenu cultissime

Un fantôme à la tête de cartoon poussant un cri d’horreur : ce masque du tueur dans Scream, dont le 6e opus est prévu pour le printemps 2023, est devenu mythique dès sa sortie. Mais cet accessoire, qui s’inscrit dans une longue tradition du film d’horreur, ne s’est pas frayé si facilement un chemin jusqu’à la production. Récit.

Un visage blanc de fantôme, des yeux et une bouche démesurément allongés, figés dans un mélange de grotesque et d’horreur : le masque popularisé par le film Scream est aujourd’hui l’un des costumes les plus vendus aux États-Unis. Mais cet accessoire a connu une longue histoire avant de devenir le meilleur moyen d’aller grappiller des bonbons aux voisins au moment d’Halloween. Lorsque Wes Craven s’en saisit en 1996 pour sa nouvelle production, il s’inscrit dans une longue tradition du film d’horreur : celle de cacher le visage des meurtriers. « Dans les films des années 40, on ne montre pas celui qui assassine. L’idée : ce qui effraie le plus est ce qu’on ne voit pas, explique Jordan Mintzer, critique de cinéma au Hollywood Reporter. Puis, dans les slasher movies des décennies 70 et 80, comme Massacre à la tronçonneuse ou Vendredi 13, apparaissent des tueurs aux visages masqués et totalement neutres. Scream est une version post moderne de ces films, son masque est à la fois effrayant et drôle, comme un cartoon détourné ». L’accessoire terrorise, en reflétant la peur des victimes, tout en permettant de garder entier le mystère autour de l’identité du tueur.

Le masque de Scream provient d’un déguisement vendu dans le commerce vendu sous le  nom de « Fantôme aux yeux de cacahuète »

Mais où donc Wes Craven a-t-il été chercher ce visage grimaçant ? Dans le scénario du film, Kevin Williamson a bien l’idée de dissimuler le visage du meurtrier, mais il n’est guère précis, se référant tout juste à un « tueur au masque de fantôme ». C’est lors de repérages pour le tournage qu’il prendra forme. Dans une maison qu’elle visite – et qui s’avère être celle où a été tourné L’Ombre d’un doute d’Hitchcock, la productrice Marianne Maddalena tombe par hasard sur le masque noir et blanc. L’objet n’est qu’un banal déguisement commercialisé en masse depuis 1991 par Fun World, le géant des fêtes en tout genre. Son nom au catalogue : Fantôme aux yeux de cacahuètes. Les sources d’inspiration de Brigitte Sleiertin-Linden, l’employée qui l’a conçu, auraient été la peinture du Norvégien Edvard Munch, Le Cri, la couverture de l’album The Wall de Pink Floyd, et les personnages fantomatiques du dessin animé Betty Boop. Ce mélange fait mouche : Wes Craven est tout de suite emballé. Mais les droits demandés par Fun World sont trop élevés. Le réalisateur déroule alors un plan B : il s’adresse à une société spécialisée en effets spéciaux, KNB Effects – qui fournira les centaines de litres de faux sang nécessaires au tournage –, pour dessiner un nouveau prototype. Las, rien ne convient vraiment, certaines têtes, tous crocs dehors, sont même très loin de l’idée de départ. Finalement, l’entreprise fabrique un modèle en mousse calqué sur l’accessoire de Fun World, en modifiant quelques détails pour éviter toute violation des droits d’auteurs. C’est avec cet exemplaire que le tournage débute : il apparait notamment dans la scène d’ouverture, dans laquelle le tueur joue avec les nerfs de Drew Barrymore lors d’un appel téléphonique devenu culte. Pendant ce temps, victoire : le volet juridique s’est débloqué et un accord est trouvé avec Fun World. Reste à convaincre Bob Weinstein, producteur aux côtés de son frère Harvey : selon lui, l’accessoire n’est pas assez effrayant. Il lui suffira pourtant de le voir à l’écran pour être convaincu. Banco.

La suite est connue : le film fait un carton auprès du public comme de la critique, et le masque devient mythique. Seules des modifications mineures y seront apportées dans les trois volets suivants du film. Vingt ans plus tard, le film est décliné en série par MTV : nouvelle ville, nouveau casting, et… nouveau masque. La diffusion du trailer fait immédiatement scandale : les fans s’insurgent contre la disparition de l’accessoire originel aux yeux allongés. À tel point que Wes Craven, qui n’a pas participé au projet, juge bon d’intervenir dans le Hollywood Reporter. « J’ai juste prêté mon nom pour cette série. Je suis trop occupé », se justifie-t-il, avant de rappeler : « je savais au plus profond de moi que ce masque était une trouvaille unique, et j’ai dû convaincre le studio de tout faire pour l’utiliser ». Les saisons suivantes, le Fantôme aux yeux de cacahuètes retrouvera sa place. On ne change impunément pas une équipe qui gagne.

  • Illustration visuel à la une Camille Gressier et ses neveux Clémence, Jules et Eléonore
Par Eléonore Théry