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« Papi » et « mamie », c’est <i>fini</i> ? - Doolittle
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« Papi » et « mamie », c’est fini ?

Ils ne sont pas en voie d’extinction, mais ils s’entendent de moins en moins. Les classiques “papi” et “mamie” seraient passés de mode, poussant les grands-parents actuels à innover, avant l’arrivée de bébé. Est-ce juste pour sortir du lot ? Pas que.

 

Durant les neuf mois de grossesse, les futurs parents se creusent les méninges : ils débattent, se tapent des barres – parfois s’engueulent – pour in fine se mettre d’accord sur le prénom que portera leur enfant. Ce ne sont pas les seuls. Au même moment, d’autres membres de la famille réfléchissent aussi à l’appellation idéale : les grands-parents. Papé, Yaya, Granny, Mimoune… On peut dire que ces derniers ne manquent pas d’imagination. Il y en a pour tous les goûts : ceux qui optent pour des noms en “o” et en “a” – tout comme les prénoms qui actuellement se donnent en masse aux bébés. On en profite pour saluer les jeunes Mia, Anna, Léo et Nino. D’autres seniors choisissent la simplicité, se faisant appeler par leur prénom. Dans certains cas, ce sont même les petits-enfants qui ont le dernier mot – illustrant parfois un problème d’élocution.

Ce qui est particulièrement flagrant : de plus en plus de grands-parents optent pour l’originalité, lassés des classiques “papi” et “mamie”. C’est le cas de Solange et Franck*, grands-parents depuis peu. Respectivement âgés de 59 et 61 ans, ce couple a retenu “papou” et “mamoune”. Le principal argument étant de se dissocier de la génération précédente : “Ces appellations représentaient nos parents, explique la jeune grand-mère. Quelque part, ça nous dérangeait. D’autant que le père de mon conjoint est encore en vie. C’est lui, le “papi” de la famille.” Pour Béatrice Copper-Royer, psychologue clinicienne et auteure de Grands-parents, le maillon fort (Albin Michel), c’est un cas très fréquent. “Il faut reconnaître que maintenant, il y a de plus en plus d’arrière-grands-parents, étant donné que l’espérance de vie augmente, analyse-t-elle. Souvent, on les nomme de façon très traditionnelle. Les grands-parents – soit la génération suivante – souhaitent donc se trouver un autre nom, afin de se démarquer.”

“Ça faisait vieux” 

Autre argument : certains grands-parents innovent refusant les appellations considérées comme “anciennes”, d’autrefois. “Tout comme pépé et mémé dans les années 1990, on trouvait que papi et mamie, ça faisait vieux…”, avoue Solange. “J’ai parfois la sensation que ces appellations sont trop associées à des grades, surenchérit Franck. On t’appelle mademoiselle, jeune homme, ensuite c’est monsieur / madame, ensuite pour certains c’est maman et papa, ensuite c’est papi et mamie et à la fin, bah il ou elle est mort·e. Je ne voulais plus de cette connotation liée à un âge, à une situation ou à un statut.” C’est aussi une question de vocabulaire qui, au fil des ans, ne cesse d’évoluer. “On ne parle plus comme dans les années 1950, lance Béatrice Copper-Royer. Il y a une évolution tout à fait naturelle des mots, des façons de communiquer. Je pense que ça va dans ce sens-là.” La psychologue rappelle que ces appellations pouvaient également dépendre des milieux sociaux. Si pépé et mémé prédominaient, il était assez courant d’entendre “bon-papa” et “bonne-maman” dans les milieux plus bourgeois.

Être “pote” avec ses petits-enfants  

Depuis l’arrivée de “papi” et “mamie” dans les années 1980 – qui nous vient très certainement du latin “pappus”, signifiant “vieillard” – nombreux sont les adultes à appeler leurs grands-parents ainsi. Désormais, les seniors – ou les “boomers” comme les appellent les millennials – veulent des noms qui correspondent à leur état d’esprit, souvent jeune, et qui sachent représenter la relation particulière qu’ils entretiennent avec leurs petits-enfants. “Déjà, on avait envie de quelque chose de rigolo”, confie Solange. Mission accomplie lorsque leurs proches, apprenant qu’ils se font appeler “papou” et “mamoune”, ne peuvent s’empêcher d’esquisser un sourire. “Mais surtout, on ne voulait pas que nos surnoms soient porteurs de scission générationnelle, qu’ils représentent une forme d’autorité ou de hiérarchie familiale. Contrairement à nous lorsque nous étions gamins, confirme la sexagénaire. On veut que notre petit-fils se sente “pote” avec ses grands-parents.”

Diversité culturelle, diversité de rôle 

Babushka (grand-mère en russe), Abuela (grand-mère en espagnol), Nonna (grand-mère en italien)… Le choix de surnom peut aussi transmettre un héritage linguistique et rappeler les origines familiales. Vous l’aurez compris, les raisons sont multiples, parfois anecdotiques, mais toujours bonnes. Ce qui frappe particulièrement Béatrice Coppey-Royer, c’est la diversité de façons de voir le rôle de grands-parents : “Aujourd’hui, vous avez des grands-parents à la retraite mais qui n’ont pas envie de se transformer en baby-sitter, des grands-parents qui travaillent toujours mais qui veulent s’impliquer, des grands-parents mariés, d’autres divorcés, ceux qui ont refait leur vie, ceux dont les enfants sont à distance…” Bref, pour une pelleté de cas de figure, une pelleté de blazes.

*Les prénoms ont été modifiés

 

  • Photo à la une de MART PRODUCTION
Par Ana Boyrie