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Éduquer ses <i>enfants</i> avec paresse, un art de <i>vivre</i> - Doolittle
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Éduquer ses enfants avec paresse, un art de vivre

Vous connaissiez le parent hélicoptère, mais avez-vous déjà entendu du lazy parenting, cette méthode d’éducation qui offre beaucoup de liberté à l’enfant ? Est-ce une si bonne chose que cela ?

Le lazy parent, à l’antipode du parent hélicoptère

Le lazy parenting, qui signifie en français « parentage paresseux », souffre d’une appellation péjorative pas forcément très représentative du concept. Ce terme décrit en réalité des parents décontractés, qui laissent leurs enfants expérimenter par eux-mêmes, sans intervenir sans cesse. Selon eux, cela permet aux enfants de comprendre les conséquences de leurs actes, et donc de s’améliorer.

C’est l’inverse du parent hélicoptère, qui supervise sans cesse son enfant, et intervient tout le temps, par peur qu’il se blesse ou ne sache pas faire. Le lazy parent n’est pas pour autant un parent démissionnaire ou négligent, il doit continuer à assurer la sécurité de son enfant, mais sans toujours réparer ses bêtises à sa place.

Par exemple, un parent adepte de lazy parenting laisse son enfant oublier son cartable, son goûter, ou de faire ses devoirs, afin qu’il affronte les conséquences de ses actes, et apprenne à y penser de lui-même. Pour les plus petits, cela peut être de laisser son enfant faire sa tartine seul, même en sachant qu’il se tachera et mettra beaucoup de temps à la faire. Ou le laisser vider le lave-vaisselle en acceptant l’idée qu’un verre puisse être cassé.

Être un parent « paresseux » n’est pas si simple

Appliquer cette méthode d’éducation suppose beaucoup de lâcher prise. Si à première vue être moins sur le dos de ses enfants peut sembler relaxant, cela demande en réalité d’aller à l’encontre de ce que la société nous demande.

Selon la personnalité du parent, il n’est pas toujours simple d’être moins dans le contrôle de la vie de son enfant, tant on a envie d’être parfait, et tant on a peur de mal faire. Cela requiert également l’adhésion du coparent à cette façon de parenter.

Mais en contrepartie, les parents ressentent, à terme, moins de pression, même si cela peut être frustrant et stressant au départ. On se détache progressivement de l’idée de penser à tout et de parer à toute éventualité.

De plus, selon les adeptes, cela peut permettre à l’enfant de devenir plus indépendant et mature, d’avoir davantage confiance en lui, de se sentir fier. Cassandre Lavisse-Dalverny, psychologue à Lyon, émet toutefois un bémol. Selon elle, favoriser l’autonomie et la prise d’initiative de l’enfant ne relève pas tellement de l’approche du lazy parenting. « Ce sont des effets bénéfiques que l’on retrouve plutôt dans un mode d’éducation plus sécurisant pour l’enfant, comme les apprentissages de type Montessori ».

Une méthode d’éducation qui a ses limites

Car, en effet, pour la psychologue, le lazy parenting pêche par manque de cadre sécurisant. « Favoriser l’autonomie de l’enfant est une bonne chose, mais le laisser comprendre les conséquences de ses actes par lui-même peut avoir des conséquences défavorables sur son développement. Pour grandir et se développer de façon équilibrée, l’enfant a besoin de se sentir en sécurité. »

Reprenant l’exemple du cartable, Cassandre Lavisse-Dalverny explique que cela met l’enfant en hypervigilance. « Il considère qu’il n’y a personne autour de lui pour le protéger, il doit tout gérer. C’est perturbant pour un enfant. Être confronté aux conséquences ne permet pas toujours de comprendre l’apprentissage. D’autant plus que la zone du cerveau qui permet de prendre en compte la notion de risque ne se développe qu’après l’adolescence. On met donc l’enfant dans une forme d’incapacité. Le désengagement parental est hyper anxiogène pour les enfants. »

Laisser son enfant en totale autonomie est donc une mauvaise chose, la psychologue parle même d’irresponsabilité, même si tout dépend évidemment de l’âge de l’enfant et de ses capacités d’apprentissage.

Il existe un juste milieu pour permettre à son enfant d’apprendre, sans être constamment sur son dos. Être ni lazy ni hélicoptère. Le tout est donc de poser un cadre « qui ne soit pas préjudiciable à l’enfant, sur le plan physique et psychologique. » Il est important de dire aux enfants ce que l’on attend d’eux, du point de vue de l’autonomie, mais en veillant à leur sécurité, et sans forcément les laisser subir les conséquences de leurs actes. Les limites doivent être clairement données.

« Il est important de communiquer avec son enfant. S’il oublie son cartable, se poser la question de savoir pourquoi. Est-ce qu’il a un trouble cognitif autour de l’organisation ? Est-ce qu’il est anxieux d’être à l’heure ? Est-ce que la maîtresse a dit que ce n’était pas grave de ne pas prendre son cartable ? C’est ça qui est fondamental, pouvoir discuter, responsabiliser progressivement l’enfant, sans se désengager » conclut la psychologue.

Image à la une via Pexels by cottonbro studio

Par Anne-Florence Salvetti-Lionne